Régénération :
le coup de pouce électronique
C'est l'un des grands enseignements du XXéme siècle. L'imposition de champs électriques qui peut accroître ou diriger le développement cellulaire du vivant. Assez pour faire repousser les os, les muscles ou la moelle épinière, à l'tmage des animaux " régénérants", telle la salamandre; Longtemps confidentielles ou dénigrées, ces recherches sont enfin reconnues à leur juste valeur.
Juillet 2006. 17 chercheurs dispersés de par le monde dévoilent comment, à l’aide de simples champs électriques, ils ont réussi à stimuler ou à contraire retarder la cicatrisation d’échantillons de cornée ou de peau de souris.
L’article, publié dans la prestigieuse revue scientifique anglo-saxonne Nature, expose un véritable travail d’équipe. L’expérience associe des laboratoires d’universités américaines, japonaise, autrichienne et britannique, dirigés par les professeurs Josef Penninger, de l’Institut de Biotechnologies Moléculaires de Vienne, Autriche, et Min Zhao, de l’Université d’Aberdeen, en Ecosse.
Dans cet article, les scientifiques montrent comment des champs électriques précisément dosés, d’une intensité comparable à ceux naturellement présents dans l’organisme, peuvent orienter et influencer la prolifération cellulaire durant la cicatrisation d’une plaie. Dans le vivant en effet, toute blessure s’accompagne d’un courant électrique minime, dénommé “ courant de blessure “ qui s’écoule de la surface par le cœur de la lésion.
Mis en évidence dès 1840 par Emile Du-Bois Reymond, l’un des pères de l’électro- physiologie, ce courant n’a été mesuré qu’au début du 20e siècle. Ses valeurs se comptent en millionnièmes d’ampères, ou en volts par millimètre. Les cosignataires de l’article vont aussi plus loin, en ciblant et contrôlant à l’aide de ces champs supplémentaires l’expression de deux gènes distincts, PI(3)K~ et PTEN, impliqués dans la cicatrisation des tissus. Une démonstration jamais faite jusque là.
La piste du courant de blessure “ Les champs électriques naturellement produits par une blessure jouent un rôle pour guider les cellules durant la cicatrisation “ résume le chinois Min Zhao.
Ce courant continu, lié à la différence de potentiel des ions sodium (-) et potassium (+) brassés à travers les membranes des cellules épithéliales, débute à 4 oA cm-2 et grimpe graduellement jusqu’à 10 oA cm-2 avant de revenir se stabiliser entre 4 et 8 oA cm-2.
Accroître la puissance du champ électrique ambiant augmente la cicatrisation des tissus de la plaie, jusqu’à un effet maximum relevé entre 100 et 200 mVmm-1. Une puissance comparable à celles relevées chez l’animal ou chez l’homme, de 42 à 100 mVmm-1. En jouant sur la polarité de ces champs (cf schéma), les chercheurs ont pu, à volonté, provoquer en réponse un regain ou au contraire un retrait des processus de cicatrisation des tissus.
Puis, dans un second temps, afin d’élucider les mécanismes cellulaires expliquant cette “ effet électricité “, ils ont pu identifier deux gènes essentiels, l’un stimulateur ou l’autre inhibiteur, dont l’expression pouvait être activée ou non par le signal électrique. ioniques des cellules de la cornée.
L’effet électricité C’est l’un des grands enseignements du 20ème siècle. L’imposition de champs électriques peut accroître ou diriger le développement cellulaire du vivant. Donc pourquoi pas la repousse ?
Depuis 1920, on sait par exemple que placé sous un champ électrique de quelques dizaines de ovolts par mm, les neurones se ramifient en direction du pôle négatif de ce champ, la cathode qui attire les électrons. Dans les mêmes conditions, les cellules musculaires orientent elles leur croissance “ à l’horizontale “, en restant perpendiculaires aux deux pôles électriques. Même choses pour les cellules osseuses, mais c’est un peu plus compliqué. L’activité électrique est inséparable de la charpente de notre organisme. Car notre squelette se révèle tout autant conducteur que générateur d’électricité.
Cette capacité particulière, mise en évidence entre 1939 et 1954 par un orthopédiste japonais, Iwao Yasuda, est due à la structure de nos os. Un sandwich de lamelles semi-cristallines superposant des couches de protéines (le collagène) et de sel calcium (l’hydroxyapatite). Tordu, pressé, étiré, c’est à dire soumis à un stress dit mécanique, ce mélange collagèneapatite du squelette produit dans l’axe de l’os des charges électriques proportionnelles aux microdéformations subies.
Connu sous le terme de “ piézoélectricité “, cet effet est typique des semi-conducteurs utilisés dans l’industrie électronique, comme les cristaux liquides. En fabriquant son propre potentiel électrique, le tissu osseux, en bon semi-conducteur biologique, attire et aligne la dépose des fibres de collagène nécessaires à la formation du tissu calleux. Lui permettant de compenser et consolider les zones sollicitées en permanence. Ou, en cas de fracture, de se reconstituer. Pourquoi dès lors ne pas appliquer ces connaissances au domaine médical ? Des tests menés sur des chiens et des lapins, entre les années 60 et 70, ont confirmé les espoirs des pionniers de la bioélectricité.
Cet article est extrait du numéro de effervesciences
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